Mon expérience au Club Med Artiste a commencé il y a quelques semaines lorsque j’ai reçu un mail d’une personne qui avait vu mes vidéos de reprises sur internet: “Ça vous intéresserait de partir une semaine au Club Med de Val Thorens en tant que guitariste? Il faut jouer tous les soirs un répertoire plutôt en anglais et le reste de la journée est libre. Tout est compris ; logement, boissons, nourriture. Il faut compter 100 euros pour le forfait ski (au lieu de 240 euros pour le public) et les frais pour aller jusque là”.
Mes souvenirs du club med remontent à mon enfance, lorsque mes parents nous emmenaient avec mon frère pour une semaine à la montagne en été ou en hiver. Et puis arrivent les images des Bronzés font du ski ! Le Club Med a-t-il évolué depuis? Je vais voir sur internet à quoi ressemble le Club Med de Val Thorens. Nouveau bâtiment à la déco très moderne qui ne me parle pas plus que ça. Je me renseigne ensuite autour de moi. Mon kiné m’explique que c’est surtout un club pour faire la fête. Les gens viennent pour skier mais aussi pour faire des rencontres et participer aux soirées organisées le soir. Les enfants ne sont d’ailleurs pas admis. Encore un truc qui ne m’attire plus. Mais j’adore le ski, les musiciens de l’équipe ont l’air sympas et j’ai vraiment besoin de changer d’air. J’en parle donc à ma femme, très compréhensive malgré le fait que cela signifie pour elle de s’occuper de nous deux enfants en bas âge pendant une semaine et de laisser son homme partir dans un club de fêtards. Elle accepte quand même. Elle sait que j’ai besoin de me changer les idées.
Second paramètre important : je n’ai aucune expérience dans un groupe de reprises. Je demande donc de m’envoyer le répertoire à connaître, histoire de voir si cela va me demander beaucoup de préparation. Les concerts sont destinés à un public international qui vient pour s’amuser, inutile de dire qu’il n’y a pas beaucoup de reprises de Georges Brassens dans la liste. Beaucoup de chansons que je ne connais même pas, en anglais pour 90%… Aie, aie, aie. Le sort s’acharne ! Je vais devoir préparer tout ça. J’appelle le guitariste du groupe. On décide ensemble de se répartir les chansons de la manière suivante : lui s’occupe des chansons à la guitare électrique (AC/DC, Dire Straits, Chic, etc.) et moi des chansons à la guitare acoustique (Clapton, Beatles, More than words, Hotel California, …). 40 chansons à apprendre et surtout une véritable motivation : il faudra les jouer sur scène ! Comme dit l’adage ; il y a une grande leçon de musique dans chaque chanson. Ça vaut la peine de s’y atteler. Je décide donc d’accepter et je confirme ma présence.
Nous voilà quelques semaines plus tard, avec ma valise et ma guitare à Dinant, lieu du départ. J’ai quitté la maison à 6h, embrassé femme et enfants avant de m’enfoncer dans une Belgique enneigée comme cela arrive très peu. On m’attend avec les croissants et un café, le temps d’échanger quelques mots et de faire connaissance, de préparer les sandwiches, de charger les valises et de partir. C’est la tempête de neige en Belgique. Heureusement nous sommes équipé de pneu neige et d’un 4X4. On roule à 70km/h depuis plus d’une heure lorsqu’on croise le premier accident, aux environs d’Arlon. La neige tombe de plus en plus. La radio annonce d’autres accidents. Je partage la voiture avec avec le saxophoniste du groupe et j’en profite pour faire connaissance. Il vient à Val Thorens depuis 10 ans, plusieurs fois par an. Il me parle du club : “Ca s’est calmé. Il y a 10 ans c’était l’orgie, ça allait trop loin. Maintenant c’est toujours la fête mais ils ferment le bar à un moment et tout le monde sort alors dans le centre de Val Tox (le petit nom que les habitués donnent à la station)”. Il me parle de la clientèle plutôt aisée ; russes, brésiliens, australiens, chinois et américains qui viennent avec les frères et les cousins. Ils paient chacun 1850 euros pour leur semaine et plus encore pour ceux qui prennent des suites. Il me parle aussi des semaines blanches (lorsqu’il neige toute la semaine). Il faut alors jouer plus souvent pour les clients qui restent au village.
La route continue, elle est dangereuse. Les rafales de vent, les autoroutes françaises deux bandes non éclairées, la pluie verglaçante. On arrive enfin en bas du col de 35 km. La gendarmerie vérifie que nous sommes bien équipés en pneu neige ou avec des chaînes. La montée commence mais nous sommes arrêtés à mi-chemin parce qu’ils déclenchent une avalanche pour sécuriser la route : une heure d’attente dans la voiture. En redémarrant on se rend compte qu’il n’y a presque plus d’essence. Nous sommes aux Menuires, il reste 9km et l’ordinateur de bord nous annonce 4 km d’autonomie, 3, 2, 1 et puis plus rien! Nous arriverons heureusement tout juste à la pompe de Val Thorens. L’aventure aura continué jusqu’au bout. Les sports d’hiver, ça se mérite !
Les G.O. (gentils organisateurs) nous accueillent avec un grand sourire et nous aident à décharger notre matériel. Nos chambres artistes ne sont pas encore nettoyées et nous pourrions dormir la première nuit dans une chambre normalement réservée aux clients. Une lueur d’espoir s’installe : nous passerons peut-être la semaine là, vu que le club n’est pas complet. En attendant d’avoir la confirmation nous montons déjà les instruments dans le bar principal situé au 4ème étage car, seconde nouvelle, le chef de village aimerait que nous jouions dès ce soir ! Ouch. Voilà 14 heures que je suis en route, je n’ai pas encore mangé et je vais devoir assurer un concert de 90 minutes, dans un nouveau répertoire et avec des musiciens que je ne connais même pas. Quelle journée ! Je fais très vite la connaissance des autres musiciens venus de Liège : un jeune mec à la batterie, son père à la basse et l’autre guitariste. Nous filons au resto enfiler un truc avant de monter les instruments sur scène. La setlist est rapidement rédigée. Le baptême du feu va pouvoir commencer!
On m’avait dit qu’il y avait des amplis sur place mais il n’y en a pas. L’ingé son, plus DJ qu’ingé son d’ailleurs, me propose de rentrer directement dans la table via une DI Box. Je lui demande de faire quelques réglages : moins d’aigus, un peu plus de hauts medium et moins de basse. Ce n’est pas son truc apparemment ! Mon son n’est pas terrible, encore moins quand je passe en distorsion. Le volume est difficile à gérer entre les rythmiques en strumming et les solos. Avec un ampli les choses auraient été plus simples ! Le temps presse et nous voilà déjà occupés à jouer le premier morceau. Moi qui suis habitué à répéter mes concerts j’éprouve un peu de mal à passer d’une chanson à l’autre, même en lisant mes partitions. De l’autre côté de la scène le bassiste joue sans partitions. Quoi? Il enchaîne les chansons, les parties sans se tromper, tout ça par cœur ! Je n’en reviens pas. Je regarde bien s’il n’y a pas de copions. Rien ! Il m’expliquera ensuite connaitre des centaines de chansons par cœur. Le groupe assure, tout le monde est habitué à l’exercice et connait très bien le répertoire. Je suis impressionné et je sens que je vais devoir m’accrocher. C’est va être plus compliqué que ce que je ne pensais ! Je terminerai le set sur les genoux et j’irai directement dormir comme ça, sans récupérer ma valise dans la voiture garée dans un parking assez loin pour ma première nuit en altitude, souvent la moins bonne.
La matinée du lendemain sera consacrée à la signature du contrat avec le Club Med (le bureau des ressources humaines n’est ouvert qu’à partir de 11h et sans contrat pas de ski pass), l’achat du ski pass (100 euros) et la location de mon snowboard et des chaussures (inclus). Nous jouons à 19h ce soir. Installation et choix des chansons que nous allons jouer vers 18h. Il me reste une bonne partie de l’après-midi pour aller skier. Le temps de manger et de rassembler nos vêtements de ski et nous voilà sur les pistes pour les premières sensations. Il neige beaucoup, le ciel est couvert, j’en profite pour me remettre dans le bain et retrouver mes réflexes en descendant la même piste bleu. Ça fait 10 ans que je n’ai plus skié mais le snowboard c’est comme le vélo ; ça revient vite. A ce moment-là je ne sais pas encore que j’aurai la chance de suivre d’autres musiciens qui connaissent le domaine des 3 vallées par cœur, skient comme des brutes et m’emmèneront hors des pistes, dans une poudreuse à peine tracée sous un ciel bleu et ensoleillé. Ces moments seront magiques, un bonheur pur, des sensations fortes qui me permettront de ne plus penser à rien, de me changer les idées pour de vrai ! Mais là, pour le moment, j’essaie d’éviter les fautes de quart et les chutes. Ma première descente de piste bleu me fait carrément peur !
La semaine continuera sous ce rythme : quelques heures de ski lorsque le temps le permet et un concert le soir à 19h puis un petit verre aux soirées du club avant d’aller dormir. Jeudi on me demande de jouer seul à la guitare dans l’espace lounge : l’Epicurious. On peut s’asseoir tranquillement, boire un bon verre ou même manger à la carte. Musique d’ambiance jazzy et personnel attentif : c’est mon endroit préféré dans le village. Le set acoustique sera un mélange de quelques reprises avec mon répertoire original. Une guitare et une voix. Ce genre d’exercice me convient parfaitement. Je propose à la chanteuse du groupe de participer. Elle accepte avec plaisir et nous prenons 30 minutes pour choisir les chansons que nous allons interpréter, ce que je n’avais pas encore eu l’occasion de faire jusqu’ici. C’est chouette de pouvoir privilégier les chansons qu’on aime. Il faut jouer une heure que je réparti de la manière suivante : 25 minutes de matériel original et 35 minutes de reprises. On va chanter en français même si le gérant de l’espace insiste sur la présence d’un public international qui ne connait pas la chanson française et m’encourage à ajouter des chansons en anglais. Comme je suis professionnel je rajoute More than words et English man in New York dans la setlist.
Il neige. J’en profite pour récupérer mon retard professionnel. Installé avec mon ordinateur portable à une table, la serveuse me propose un cocktail sans alcool : jus de craberry, d’ananas, de banane et d’orange mélangés. J’ai demandé un accès premium au WIFI mais la connexion est tout de même mauvaise : 1,7 m/s avec le vent dans le dos. Cet accès premium, comme d’autres choses, est payant. Le Club Med est contrôlé par Fosun, son actionnaire chinois principal, depuis quelques années. On sent que la rentabilité fait partie de leur nouvelle stratégie et beaucoup de privilèges accordés aux musiciens ont disparus. Le forfait ski, gratuit pour les musiciens il y a encore quelques années est désormais payant. Le tarif reste préférentiel ; 100 euros la semaine au lieu de 240 euros. Les boissons au bar sont également payantes. Nous avons réussi à négocier cela avec le chef de village, très compréhensif, qui nous a accordé les boissons gratuites mais c’est une exception : normalement il faut payer pour les boissons en-dehors des repas. Les musiciens ne sont plus logés dans le village mais dans un bâtiment extérieur. Une navette passe trois fois par heure. Ce n’est pas du tout pratique. Lorsqu’on va skier, il faut ensuite retourner à Val Roc prendre une douche et se changer pour jouer le soir, quand ce n’est pas à 16h30. On perd beaucoup de temps à faire ces aller/retours. Et le soir il n’y a plus de navettes, il faut rentrer à pied, souvent sous la tempête de neige. Les musiciens que j’accompagne et qui sont habitués au Club Med m’expliquent que les privilèges artistes diminuent un peu plus chaque année.
A 22h je monte sur scène pour démarrer le concert. Mis à part mes camarades musiciens qui sont venus écouter par sympathie, il n’y a pas grand monde dans la salle. Le chef de village a eu la bonne idée de programmer le spectacle des G.O. en même temps dans la grande salle du 4ème étage. Je démarre tout de même avec quelques compositions originales : J’ai horreur des voyages, Le goût de toi, et Le bruit et la fureur. J’enchaîne ensuite avec une reprise acoustique un peu décalée des Démons de minuit d’Images. La chanteuse me rejoint sur scène pour une reprise de Johnny Hallyday : Ma gueule, une de mes chansons préférées de l’artiste. Nos deux voix fonctionnent bien et j’apprécie vraiment cette formule acoustique pendant laquelle je peux proposer un accompagnement à la guitare un peu plus sophistiqué. Le set se prolonge avec Foule Sentimentale d’Alain Souchon, Message personnel de Françoise Hardy, Un homme heureux de Sheller. J’invite ensuite le bassiste du groupe à venir chanter quelques chansons de son répertoire et je clôture avec ma reprise en fingerstyle de Benjamin Biolay : La superbe. C’est à ce moment qu’un groupe d’anglais me demandent : “One more” ! Ça me fait plaisir 🙂 J’enchaîne avec Une fille m’a dit. Les anglais, très sympas, me font un beau compliment : “great song, great voice ! ” (belle voix, belle composition). Et me demandent comment l’histoire de la chanson se termine. Je laisse ma réponse en suspens. J’avais pris quelques disques pour les vendre après les concerts mais je comprends que ce n’est pas l’idée au Club Med, dans une formule “all inclusive”.
Vendredi nous jouons à 16h30 et à 19h dans la grande salle. Un set d’une heure à chaque fois. La neige continue à tomber et je n’ai pas vraiment envie d’aller skier dans ces conditions. Me revoilà dans l’espace lounge avec mon ordi à avancer sur l’écriture de cet article. Une éclaircie fait soudainement son apparition. C’est l’avant dernier jour et je veux skier. Avec le saxophoniste nous décidons de foncer à l’appartement enfiler nos vêtements de ski. Nous n’aurons jamais été aussi rapide pour monter sur un télésiège. Le ciel restera bleu une petite heure mais nous en profiterons à fond avant de rentrer à Val Roc pour nous changer en vue du concert du soir. Réunion à 18h pour choisir les chansons. On se permet de reprendre certains titres joués en début de semaine. On sent que le groupe joue tous les soirs, l’ambiance est très bonne et ça envoie ! Le guitariste propose d’optimiser l’éclairage pour une formule “concert”. C’est vrai que pour le moment on se croirait dans un hôpital. Les lumières LED sont froides et il y a du niveau partout. L’ambiance change instantanément : nous aurions dû y penser plus tôt! Ce sera notre meilleure performance. Les G.M. applaudissent, l’ambiance est au rendez-vous et tout le monde s’éclate sur scène. Ce concert restera un très bon souvenir.
Regard par la fenêtre au réveil le lendemain matin : le beau temps n’est toujours pas au rendez-vous. Pas de chance décidément. J’espère une amélioration dans l’après-midi. Elle n’arrivera pas et je finirai par me retrouver tout seul sur la piste des deux lacs ! Nous jouons à 19h aujourd’hui. Ce sera le dernier set de la semaine. Je monte sur scène avec l’envie d’en profiter un maximum et déjà une forme de nostalgie. Le temps passe vite et le concert se termine avec “Allumer le feu” de Johnny Hallyday. Le claviériste et moi ne connaissons pas le morceau. Nous regardons attentivement le bassiste qui nous dicte les accords tout en jouant : “Fa, mi, ré…”. Après une semaine à faire ça je commence à avoir l’habitude et un tour plus tard j’ai le morceau dans les doigts. Ça envoie bien, on s’amuse sur scène et le public y est réceptif.
Lever dimanche à 7h pour embarquer les valises dans les voitures. Nous filons ensuite au petit-déjeuner. La météo s’annonce très bonne avec un beau grand ciel bleu. Un peu frustrant de voir ça le matin du départ ! Il y a d’ailleurs déjà beaucoup de monde en tenue de ski qui prend des forces avant d’aller sur les pistes. Bande de veinards ! Je croise un anglais chevelu qui me demande de quelle année est ma guitare, m’explique qu’il joue plutôt sur une électrique. J’enfile mon “english breakfast” et prépare un sandwich pour la route et nous quittons Val Thorens à 8h30. En bas du col le GPS nous fera passer par le Lac D’Annecy et les routes départementales. Pas idéal pour le confort de conduite mais une économie de 100 km en essence et moins de péages. Nous arriverons à 18h au lieu de rendez-vous. Je récupère ma voiture et roule en direction de la maison ou ma petite famille m’attend, des souvenirs plein la tête et l’envie de leur raconter tout cela en les serrant très fort dans mes bras.
Quelques conseils avant de partir :
En préparant les valises pensez à bien séparer ce qui est musique du reste. Comme les chambres ne sont pas sur place et que vous êtes susceptible e jouer le premier soir, rassembler tout le matériel musique dans un sac à part. Vous pourrez laisser votre valise à l’appart et apporter le reste au village.
Je vous conseille aussi de préparer les chansons dans leur entièreté. C’est-à-dire de bien connaître les différentes parties, de savoir les enchaîner et de ne surtout pas compter sur une répète. Une fois sur place, il n’y a pas le temps pour répéter. La setlist est déterminée une petite heure avant de monter sur scène et il faut savoir jouer les morceaux directement. Lancer les intros, avec les bons tempos, de manière créative, avec un bon son. Vous devrez être prêt à improviser un beau solo sur les grilles, avec les variations, à n’importe quel moment. Ce n’est pas évident. Le mieux c’est de connaître les chansons par cœur.
C’est important d’apprécier le répertoire qui va être joué. C’est la raison pour laquelle j’ai particulièrement apprécié mon concert du jeudi dans l’espace Lounge. J’ai pu jouer un répertoire en français que je connais bien, que j’apprécie et qui correspond à mon jeu de guitare actuel. Dans la formule full band c’est d’ailleurs dans les moments acoustiques (Layla, Caravane, Hallelujah, etc.) que je parvenais à m’exprimer le mieux.
Il faut vraiment aimer jouer des reprises. Il n’y a pas beaucoup de place pour un répertoire original. Je remercie Fred de m’avoir donné la possibilité de jouer mes chansons sur scène mais ce n’est pas toujours comme ça et la plupart du temps vous jouerez des reprises qui plaisent à un public international. Des “cocottes” comme on dit dans le jargon.
Pour le Club Med en hiver, c’est vraiment important d’aimer skier. A part des promenades en raquettes, vous n’aurez pas grand chose d’autre à faire de vos journées.
J’en ai parlé plus haut mais je le répète : il faut savoir improviser des solos sur toutes les grilles. Et sans fausses notes, le public vous écoute en direct et vos amis musiciens aussi. J’ai donc beaucoup utilisé la gamme pentatonique dont je parle dans cet article !
Il ne faut pas compter sur l’ingé son qui sera sur place et donc avoir une autonomie en prenant un ampli.
Il faut aimer la vie en groupe et les rencontres avec d’autres musiciens. J’ai eu la chance de me retrouver dans un super groupe, avec des musiciens très sympas. Ils m’ont tous appris plein de choses en les écoutant jouer mais aussi lors de nos nombreuses discussions. Vous passerez beaucoup de temps avec les musiciens du groupe. Mieux vaut bien tomber.
Pour résumer :
Les +++
- Le ski aux 3 vallées qui est le plus beau domaine skiable du monde !
- La formule all inclusive avec des buffets très sympas et variés. On ne pense plus à rien et cela fait partie de l’expérience “déconnexion”.
- En jouant tous les soirs un concert de 90 minutes pendant une semaine on apprend beaucoup de choses.
Les —
- Les frais supplémentaires : le voyage A/R, le forfait de ski, l’accès WIFI premium (30 euros la semaine), les boissons payantes, le saune/hamman payant.
- Le logement à l’extérieur du village.
- Le manque d’ingé son compétent (je n’ai peut-être pas eu de chance cette semaine là), de matériel pro (table de mixage correcte, compresseur, EQ, reverb) et d’ampli guitare sur place.
Voilà mon retour d’expérience en tant que guitariste au club med. Avez-vous déjà eu l’occasion de jouer au club ou dans le même genre de configuration, cela vous tenterait-il d’essayer? Dites-moi dans les commentaires ce que vous pensez de tout ça, je vous lirai et y répondrai avec plaisir !
J’en ai profité pour réaliser un petit vlog qui reflète l’ambiance de cette semaine en vidéo :
Comment devenir guitariste professionnel? Interview Jean-François Assy
Comment devenir guitariste professionnel?
Jean-François Assy, musicien ayant joué, entre autres, avec Alain Bashung, Daniel Darc, William Sheller, Christophe et Hubert Félix Thiéfaine est passé à la maison le temps d’une interview. Il m’a expliqué comment devenir musicien professionnel et comment il s’est retrouvé à jouer avec toutes ces pointures. Voici la transcription de cet entretien très intéressant :
Olivier JUPRELLE : Qu’est-ce que tu conseillerais à un musicien qui débute et qui veut se lancer comme professionnel?
Jean-François ASSY : Déjà de maîtriser son instrument. C’est le premier truc parce que il y a beaucoup de gens sur le marché qui attendent. Des mecs qui jouent vachement bien en plus ! Après ça il ya aussi un vrai truc de rigueur, du sérieux. Sans être”boring”, tu vois le truc hyper ennuyeux, mais vraiment il faut être sérieux quoi parce que les mecs qui arrivent un peu foufou, “moi je vais tout casser”, parce que je vais révolutionner un machin ouais ça peut marcher mais ça n’a qu’un temps quoi. Les mecs comme ça en général ils passent vite. Si tu veux rester dans le truc il faut être rigoureux parce que c’est là dessus que beaucoup d’artistes comptent aussi en général. C’est pas un secret il y a quand même pas mal d’artistes qui ne sont pas hyper “straight”, qui ne sont pas hyper rigoureux et donc s’ils n’ont pas une équipe autour d’eux un peu solide ça peut vite se barrer en cacahuète.
Olivier JUPRELLE : Alors ça veut dire quoi être rigoureux? Ca veut dire arriver à l’heure aux répétitions? Rentrer directement après le show?
Jean-François ASSY : On peut quand même un peu faire la fête ! Etre sérieux aux répètes, arriver en connaissant les morceaux. Il n’y a pas que ça, il faut amener des choses aussi parce que ne faire qu’écouter un morceau, noter la grille, écouter ce qui se passe, faire une dictée et puis reproduire sur scène le morceau je veux dire il y en a plein qui peuvent le faire. Après c’est plus intéressant aussi de pouvoir dire : tiens, moi j’ai refait ce boulot là mais en plus je peux amener ça est-ce que ça t’intéresse? Si je propose ça, est-ce que ça te va ou pas? Avoir une approche créative et ne pas hésiter à apporter un peu de sa personnalité dans sa transcription. Ne pas être ne pas être vraiment enfermé dans la transcription. Alors tu as des artistes qui diront : “non j’ai mon idée et je veux que ce soit comme ça et pas autrement” et donc à ce moment là tu suis où tu suis pas. Tu peux te barrer aussi, enfin voilà y’a pas de problème mais par contre il y a des artistes qui sont demandeurs de ça. Bashung demandait d’être étonné constamment.
Olivier JUPRELLE : C’est exigeant hein ! Étonnez-moi !
Jean-François ASSY : C’était “étonnez-moi” et en même temps on était les premiers étonnés de bosser avec lui aussi parce que lui aussi parfois avait des idées. On se disait il est fou, ça ne va jamais marcher et puis, au final, en essayant, on se dit “ah oui il sentait bien le truc quand même”! Il fallait être créatif. Un mec comme Christophe aussi aime bien qu’on lui amène des sons. Il est curieux de tout donc il aime bien quand on amène une nouvelle pédale, qu’on lui fait écouter un truc. “Ah ouais j’aime bien, je connais pas ça, c’est cool” ! Si on rentre dans une espèce de routine ça peut vite l’ennuyer quoi. Il faut être rigoureux, être créatif tout le temps. Etre un peu intéressé de tout, écouter un peu ce qui se fait aussi en dehors parce que sinon si tu te mets dans un truc hermétique. Mais tu dis : “ok, moi voilà ce que je peux faire”. Je fais que ça et j’écoute que ça, ça ne marche pas non plus. Il faut rester ouvert quand il y a tellement de trucs qui se font partout maintenant. On a accès à tout aussi donc après faut pas copier mais il faut surtout écouter ce qui se fait, avoir des antennes un peu un peu ouvertes.
Olivier JUPRELLE : Pour se résumer on dirait 1 : il faut bien connaître son instrument.
Jean-François ASSY : Ouais ça je pense quand même oui.
Olivier JUPRELLE : Et moi qui ai déjà eu une expérience aussi de travail de collaboration avec toi, je peux vraiment confirmer que quand Jeff
arrive à une répétition, non seulement il connaît la grille vraiment super bien, et en plus c’est en place ! Le timing est nickel et donc c’est vrai que ça s’est vraiment important pour se lancer là dedans. Je pense que la base c’est vraiment d’être un excellent musicien. Mais comme tu l’as dit ça ne suffit pas.
Jean-François ASSY : En fait le truc c’est… Enfin de connaître le morceau et de pouvoir le reproduire, on va appeler ça la partie technique. Et quand la partie technique est connue alors tu peux parler musique. Mais si tu n’as pas cette partie technique, si tu n’as pas déjà cette base là alors c’est compliqué. Par rapport à la concurrence où tous les autres mecs qui vont se ramener et qui ont un bon niveau. C’est compliqué de passer à autre chose quoi. Moi c’est mon père, qui est violoniste classique, c’est lui qui m’a appris beaucoup de choses et quand j’étais gamin. Il me disait : apprend d’abord la base technique parce qu’après on parle musique et la musique et la technique, l’un ne va pas sans l’autre mais c’est pas forcément exactement la même chose non plus. Il y a des gens qui sont techniquement balèzes mais qui musicalement n’ont rien à dire et donc c’est moins intéressant. Donc il faut pas que ça, il faut la base technique ensuite après tu disais la rigueur quand même, le sérieux de la répétition. Qui fait partie à mon avis de la base technique. Le fait d’être à l’heure aux répètes, savoir gérer ton planning aussi quand tu es appelé par différents artistes.
Olivier JUPRELLE : J’imagine qu’il y a des moments il y a des dates qui arrivent sur le même jour,
Jean-François ASSY : Il y a parfois des dates qui clashent. Là il faut être sérieux aussi par rapport aux gens qui t’ont engagé, etc. Tu ne peux pas être à deux endroits au même moment, donc il faut avoir un agenda quand même assez clair.
Olivier JUPRELLE : Ensuite être créatif, c’est-à-dire ne pas avoir peur de venir avec sa personnalité quand même, donner des idées. Après, rester quand même au courant de ce qui se fait parce que c’est vrai que toi tu travailles beaucoup finalement dans le secteur chanson française. Tu ne fais pas que ça mais la majorité des artistes de haut niveau qui t’appellent sont souvent dans cette sphère de “chansons française”.
Jean-François ASSY : Il y a tout l’international aussi. Tu as a tout ce qui se fait aux Etats-Unis, en Angleterre… Moi je bosse beaucoup en Flandre.
Olivier JUPRELLE : Oui c’est vrai que tu fais ça aussi !
Jean-François ASSY : L’autre partie de la Belgique, au niveau mentalité et culture musicale, ça n’a rien à voir avec notre culture à nous. C’est con mais c’est comme ça.
Olivier JUPRELLE : Ce que je voulais dire par là c’est qu’on t’appelle pour tout ce qu on a énuméré avant mais aussi parce que tu as tes antennes dans la chanson française et que tu proposes des choses qui sont en raccord, qui sont alignées avec cet univers chanson française.
Jean-François ASSY : Ça reste ma culture!
Olivier JUPRELLE : Tu ne vas pas proposer des lignes ska sur un morceau de chanson française. Ou en tous cas tu l’adapteras de manière à ce que ce soit chouette. Donc moi je suis vraiment d’accord avec ce que tu dis le fait de garder des antennes et de rester connecté à ce que tu fais comme musique et à ce que d’autres proposent.
Jean-François ASSY : Voilà ça fait partie aussi du tout quoi! Ça c’est comme tout. Je pense que le mec qui fait de l’informatique, s’il ne s’intéresse pas aux dernières nouveautés qui sortent, il est vite largué. En musique c’est pareil.
Olivier JUPRELLE : Comment tu as fait pour finalement te retrouver sur ces projets-là, être engagé par ses pointures?
Jean-François ASSY : Ça s’est vraiment c’est au fil des rencontres. Moi j’ai fait le conservatoire classique au violoncelle et donc j’étais plutôt destiné à faire un parcours vraiment très classique. Quand j’ai au 16/17 ans j’ai voulu vraiment sortir de ça parce que je n’en pouvais plus. Je sentais que c’était pas ça qui me correspondait vraiment à fond. Donc j’ai commencé vers 16/17 ans à jouer un peu dans des petits groupes à gauche à droite en sachant que c’était vraiment ça que j’avais envie de faire. Mais bon c’est pas pour ça qu’on y arrive forcément. Et puis moi c’est au fil des rencontres… J’étais très pote avec un ami violoniste qui un jour m’a appelé pour faire William Sheller. Donc là évidemment pour moi c’était la première grosse tournée importante qui sortait évidemment du milieu de la musique classique. Donc j’ai dit oui tout de suite et puis après William Sheller, très vite, j’ai rencontré un autre mec qui s’occupait e Yann Tiersen. Et hop j’ai été engagé avec Yann Thiersen. Et puis j’ai entendu parler que Alain Bashung organisait des auditions pour sa tournée retour, la tournée des grands espaces. Donc j’ai été passer l’audition. J’ai été pris. Après tu rentres dans un milieu, on parle de toi dans ce milieu, ton nom commence à être connu. Via Bashung j’ai rencontré Christophe. Quand il a pensé que ce serait bien qu’il y ait un violoncelle sur scène à côté de lui il a pensé à moi directement. C’est vraiment des rencontres et puis il y a des fois ça se fait des fois ça se fait pas!
Olivier JUPRELLE : C’est donc à la fois le réseau quelque part, le fait de quand même être dans le milieu et de faire des rencontres. Commencer avec un premier projet qui va t’amener à rencontrer d’autres personnes sur un autre projet et puis après le jour où tu fais l’audition pour Alain Bashung, il faut assurer. Donc il faut les deux! De nouveau, il faut la technique et après le réseau mais si tu as que la technique finalement tu va pas refaire de rencontres parce que ça se passe aussi là, ça se passe au bar, tu discutes avec le mec.
Jean-François ASSY : C’est sûr qu’il y a une connexion. Il y a un côté public relation. On ne peut pas être complètement fou fou dans tous les sens. Tu ne peux pas non plus être autiste. Il faut il faut quand même rester ouvert, il faut discuter avec les gens. Puis il y a des gens avec qui ça l’fait puis d’autres avec qui ça passe moins bien. C’est pas grave hein ! Je me souviens, après Bashung, j’avais été faire 2-3 heures chez le chanteur Raphaël. On a passé un très chouette moment. On a fait de la musique ensemble, très cool. Et puis une semaine après il m’a rappelé. Il m’a dit : “ouais mais je crois que finalement ma tournée je vais la faire tout seul”. Pas de problème! On a essayé, c’était cool, on s’est très bien entendu on n’est pas fâché du tout mais ça s’est pas fait. Peut-être une autre fois, peut-être jamais, voilà c’est la vie!
Olivier JUPRELLE : Merci Jeff ! A bientôt. Ciao !
Voici la vidéo de ce très chouette entretien avec un grand musicien :